Ringo - vers 18h

Que c’est bon d’être en final, mais vraiment. Quand je fais mon bilan, je trouve que j’ai été l’un des plus persécutés ici, par les infos et tout, du coup c’était légitime pour moi qu’on me rembourse toute cette gêne sous forme d’un pass direction final-land. Je suis bien dans mon navire, et je nargue même les éliminés restants, passant mon temps à leur montrer Ô combien je suis devenu supérieur à eux. On me surnomme à présent l’esclavagiste, ce qui me va bien je trouve. Et on peut entendre à présent … Ramenez une grappe de raisin à l’esclavagiste, et que ça saute les petits vermisseaux !! Grosse tête puissance mille ouais. Je suis au top de ma forme, puisque de 1/j’ai évacué le stress du prime en apprenant que j’étais enfin finaliste, et 2/les peu d’amis que j’avais ici m’ont finalement consolé, me remontant le moral à propos des événements que j’avais malheureusement appris au prime. Maman je t’aime, c’est tout ce qu’elle a à savoir, et elle doit s’estimer heureuse d’avoir un fils qui l’aime, du moins c’est comme ça comment on me l’a expliqué. Hinarani a été définitivement rayé de la carte de mon cœur, et à présent je me sens enfin un nouveau Jan, un nouveau bébé Jan tout juste sorti d'un nouveau ventre, muté à présent en souverain. Je me sens aimé, et ça me fait du bien de compter sur le peu de personnes qui me reste ici. Je circule donc, mes mains dans mes poches, flânant librement, ne sachant plus vraiment où aller. Je fais un léger détour pour m’engouffrer dans la salle de projection histoire de me servir du pop-corn et me barrer … j’ai plus de clope, du coup je me dis que manger du pop-corn ça occupera mes dix petits doigts un instant … Je pénètre donc dans la salle dont je n’y avais plus mis les pieds, depuis mon pseudo-rendez-vous secret avec Ember …Je me dis toujours que c’est ici où Jason a violé les lèvres de ma douce, c’est peut-être pour ça que je me tiens à l’écart de certains lieux, comme celui-ci ... ou pas, ou du moins ça doit être une simple coïncidence que je viens tout juste de remarquer. Je décèle au loin la silhouette longiligne de Ringo et je me surprends à stopper net ma marche pour faire deux pas en arrière. Enfaîte, mon cerveau me dicte et m'informe que c'est déjà assez compliqué maintenant, et que je suis prié de quitter les lieux car je n’ai vraiment plus rien à faire avec elle, d’ailleurs elle est éliminée et je ne vois pourquoi elle s’obstine toujours à rester … Elle veut nous faire chier ? Elle sert plus à rien à vrai dire. Elle a aucun prétexte maintenant, Lee n’est plus là, Zadig refuserait de justifier la présence de la miss ici, et moi de même. Elle n’a jamais, ou je dirais n'est plus venu me voir après quand j’avais besoin de son soutien ou justement de sa présence pour que je me sente au moins encadré par quelqu'un ... que j’avais au moins une amie avec moi dans ce jeu… sauf que non on dirait qu’elle m’a clairement oublié la gueuse, contrairement à d’autre qui étaient bel et bien présent …  Et ça me surprends moins, puisque j’ai eu ma dose l’autre soir. Je croyais que je comptais pour elle et que j’étais son ami, mais bon, on se trompe des fois, souvent même, donc c'est bon. Et puis c’est une tarée, normal on va dire qu’elle se comporte ainsi mais … franchement j’espérais mieux. Du moins je voulais mieux que ça. Elle pouvait quand même faire un effort non ? Je suis l'un des premiers à reconnaitre en Ringo une pure associable, mais je pensais que c'était différent avec moi. Je décide néanmoins de ne pas rebrousser le chemin et de venir silencieusement me placer juste derrière son siège. Je néglige carrément le film qu’elle est entrain de voir, toute mignonne qu’elle est, assise en mode forever alone … ou pas. Non mais faut pas oublier, elle a son p'tit pote invisible avec elle, on vient tout juste de piger pourquoi maintenant elle pouvait rester des heures sans réel contact humain… Je chuchote à l'encontre de mon siège qui se tient juste à ma droite, bien évidement vide. « Chuuut Carlos, tu vas les déranger … tu vois pas qu'ils sont entrain de voir un film ... »  ouais je l’ai vécu trop mal ce truc, dans le genre jalousie de possessivité m’ouais, j’avoue, puisque je croyais que j’étais le seul qu’elle avait … J’aimais bien l’effet que je faisais sur elle en la rejetant et en lui faisant croire qu’elle valait pas beaucoup, et je voulais vraiment que ça reste toujours ainsi … c’est égoïste mais bon ... et puis je sais bien que c’est qu’un être imaginaire son truc, mais c’est plus comme avant … Et sinon les vrais individus vivants ils existent dans son monde la petite ? « mais chuut j't'ai dit crétin elle va se retourner et appeler le black qui nous fera sortir de cette salle … » Je fais le con avant qu’elle se retourne définitivement … Ah et bien voilà, je vois qu’on existe encore, bien. Je croise les bras, mon sourire de branleur gros format sur mes lèvres… « Salut la disjonctée … » J’aime bien ce surnom, beaucoup mieux qu’½ moi je trouve … « Alors tu veux pas nous présenter ton pote ? Moi je suis venu avec mon pote Mario Klinefelter et mon sex-friend Carlos … » Il me siffle qu'il s'appelle Maria mais on s'en fout non ? Je montre respectivement les sièges à ma droite et à ma gauche … On est tous des cas extraordinaires ici, bien sûr. 5 erreurs de la nature réunis, si c'est pas beau ça. « Ils sont très enchantés de faire ta connaissance … Mario trouvait ton pote vraiment séduisant, elle/il je sais plus vient de me chuchoter que tu avais vraiment très bon goût  pour choisir les ‘’gars’’ que tu fréquentais … » haha, hum. Non mais c’est pas méchant, je me tape juste sa tronche. Je lâche mon rire de merde et je m’approche un peu plus de son oreille … « dis moi, tu m’explique un peu comment ça se passe entre vous parce que je t’avoue je suis encore un peu paumé là … » non mais franchement je m'en branle, je sais même pas pourquoi je viens lui parler enfaîte ... Je crois pas à ces conneries moi ... D'ailleurs actuellement je commence à penser sérieusement à me barrer tellement je trouve plus trop le plaisir de la vanner, ni lui tenir compagnie, tout court ...

Je ne suis même pas sûre de savoir ce que je fous encore là. Enfin si je sais. Quand on me dit tu pars, je reste. C'est mon attitude qui apprécie la contradiction. En plus je suis sûre que ça les fait un peu chier de me voir me trimballer sur l'échiquier avec mon aura flippante toute récemment acquise depuis la révélation de ma tare. On me regarde comme si j'étais folle. J'en suis à un tel stade, qu'en cinq jours pas une personne n'a osé venir me parler de mon homme imaginaire. Quelle bande de crétin. Quoi que ça m'arrange de ne pas avoir à m'expliquer encore et encore à ce sujet, mais c'est assez effrayant de se rendre compte que mon état doit presque leur faire peur. Je n'ai pas fait de prison, je ne tue pas les gens par une étrange malédiction et pourtant je reste celle qu'on préfère éviter. Je zone dans l'échiquier en appréciant la solitude qu'on m'offre enfin, me décidant d'entrer dans la salle de projection déserte. Ils restent tous dans la villa. J'aurais sans doute pu le faire également si seulement j'étais capable d'encore partager le lit de quelqu'un ici. Je parcours la liste de film disponible et me décide finalement pour quelque chose de vieux, chiant, en polonais que je ne maîtrise qu'en me concentrant. Exactement ce dont j'ai besoin pour me vider la tête. Je m'assois dans un des fauteuils et me plonge dans les images qui se dessinent sur l'écran. J'entends quelqu'un entrer et je me dis que le choix du film aura au moins le mérite de faire fuir l'intrus. Un chuchotement parvient jusqu'à mes oreilles. Le truc bien chiant qui se veut silencieux, mais qui est bien plus désagréable que si on se mettait directement à parler. Je devine facilement l'identité du relou qui vient de s'incruster et j'ai encore moins envie de le voir que le reste des candidats. Je ne comprends pas vraiment pourquoi, c'est flou, mais c'est là. Je peine à supporter sa présence. Enfin plus qu'avant. Ce n'est plus juste un léger agacement de me prendre ses vannes en pleine tête, mais une véritable gêne. Je crois que je suis un peu vexée de la façon dont il a pris les choses. A la rigolade, se marrant à moitié au moment où les présentateurs ont révélé en direct qu'il m'avait dépucelée alors que je me liquéfiais sur place de l'autre côté du plateau. Je ne regrette pas, mais par contre j'espérais qu'il serait plus avenant, plus je ne sais quoi par la suite et que je pourrais l'envoyer balader en lui rappelant que ce n'était strictement rien. Sauf qu'il se comporte exactement tel que je souhaitais qu'il le fasse, comme s'il ne s'était rien passé. Du coup ça me fait chier. Il n'a même pas eu un mot rassurant après la révélation de ma tare ou suite à mon élimination, préférant s'intéresser à Gaïa et son cul parfait ou Eléa et sa vie amoureuse tragique. Quel con. Il parle dans mon dos, me faisant me retourner vivement dans un soupir pour river mes yeux excédés sur les siens. Qu'est-ce qu'il me veut sans déconner ? « M'appelle pas comme ça. » je rétorque en fronçant les sourcils lorsqu'il me surnomme la disjonctée. Je fais une légère moue désapprobatrice lorsqu'il me présente ses deux "amis", avant de me retourner sans un mot vers l'écran. Il me fait chier avec son Mario et son Carlos. Je trouve ça presque blessant qu'il tourne en dérision ce qu'autour duquel toute mon existence semble graviter. Là tout de suite il n'est pas un crétin gentil, mais plutôt un crétin con. Je n'arrive même plus à me concentrer sur les dialogues de mon film. S'il s'agissait d'une télévion, j'aurais sans doute attrapé la télécommande pour augmenter le volume sonore jusqu'à ce que ça m'arrache les tympans et que je ne puisse plus entendre Jan. Ce qui est chiant avec un cinéma à domicile, c'est que cette petite démonstration ménagère d'asociabilité perd tout son effet lorsqu'on est obligé de lever ses fesses de son siège et de regagner la commande de la salle de projection. Il se penche et je sens son souffle chaud buter contre mon oreille ce qui me provoque un frémissement. D'agacement je m'imagine, puisque je me retourne vers lui dans la seconde en le fusillant du regard. « Qu'est-ce que tu veux savoir ? Comment on baisait ? » je l'interroge, quasiment aggressive. Parce qu'en plus je suis sûre que c'est le point précis qui l'intéresse. Le sexe. Il doit s'imaginer des choses bizarres, peut-être même salaces, alors que ma relation n'a rien de malsaine. Enfin, si seulement elle ne se déroulait pas avec un partenaire qui n'existe pas, elle paraîtrait tout à fait normale. Je soupire encore une fois, puis cède. « C'est subtile. Je m'allonge sur mon lit, je ferme les yeux et je pense. » Tout simplement. Je rêve. J'ai besoin d'être seule pour pouvoir être avec lui, ce qui explique ma quête perpétuelle d'isolement sur l'échiquier. Je n'ai pas un copain invisible qui se promène toujours à côté de moi comme il le parodie en ce moment. Je me mordille doucement ma lèvre inférieure d'un air pensif, pendant que j'hésite à lâcher la question qui me brûle les lèvres. « Ca te dérange ? » je l'interroge avec une certaine curiosité. Je m'étais dit que le moment idéal pour lui demander de perdre ma virginité était de le faire avant la révélation de ma tare, persuadée qu'il serait peut-être plus réticent en connaissance de ce détail. Je l'observe avec mes deux grandes prunelles sans savoir, naïvement, si les petits amis imaginaires sont considérés comme gênant.

Elle veut que je l’appelle comment ? La timbrée ? La cinglée ? J’en ai un sac tout plein avec des synonymes en fureur si elle veut. « Oh excuse moi je croyais que je parlais à la disjonctée ... T'es pas celle avec le secret ''émouvant'' de la saison ? » bah quoi ... à chaque saison ils nous mettent un secret pour chialer c'est bon on a compris ... « Vous vous ressemblez vachement bien ... alors rappelle moi comment tu t’appelle déjà … ?  j’ai oublié hein ça arrive, du moins ça tu devrais me le pardonner facilement ...» Oublier. Oublier des gens, oublier comment on salue les gens, comment on sourit aux gens, prendre un peu de leurs nouvelles, tout ça je crois qu’elle connait donc elle va pas me sanctionner là-dessus si ma mémoire commence à déconner aussi. Je soupire. C’est peut-être méchant, mais pas pour moi. C’est la pure réalité, conceptualisée à ma façon, de mon point de vue très subjectif et très loin de l’objectivité … L’idéal aurait voulu que je la prenne dans mes bras pour atténuer le fardeau supplémentaire qui vient de se rajouter à elle, maintenant que tout le monde sait quel est son problème, mais non … J’adopte peut-être un comportement cynique, mais j’y peux rien si la vérité la blesse. Après tout je vois plus pourquoi je resterais le même avec elle, elle ne mérite pas tant de gentillesse et d’attention de ma part. Je suis peut-être du genre atteint d’un grave excès de compassion, surtout quand il s’agit d’une femme, mais là ça bloque et je sais pas pourquoi, preuve qu’il y’a un truc qui a changé, une sorte de cassure. Je sais pas si c’est après avoir couché avec elle, ou après la révélation de son secret. La voir toute seule ne me fait plus rien d’ailleurs, voir que tout le monde la rejette un peu moins, mais à un degré moindre, à l’échelle microscopique même, mais c’est assez suffisant pour que je vienne briser la barrière et oser le premier pas. Pour elle, je dois présumer c’était presque impossible que ça se produise, je veux dire qu’elle vienne vers moi, bizarre comme elle est.  Si j’étais pas aussi bon, je me serais toujours obstiné à rester dans ma bulle et je n’aurais eu aucun mal à l’ignorer. L’indifférence, quand elle intervient de mon côté, devient pour autrui lourde et pesante, Hina en avait fait les frais, et dieu sait à quel point je suis têtu que j’aurais pu rester campé sur mes positions jusqu’à la fin. Je profite du silence, et du fait qu’elle s’est retournée pour lever les yeux vers l’écran et voir un peu ce que la jeune femme regardait. Je m’en branle catégoriquement mais … c’est du polonais ça ? Elle est sérieuse ? Genre elle comprend bien ce qui se dit ou bien elle le met juste pour se défoncer le cerveau, qui doit déjà être défoncé de naissance on va dire, hum … Ou bien elle est polonaise ? Je croyais qu’elle était british la demoiselle … Ah nan j’ai pigé !!  C’est parce que son pote invisible c’est un polonais qui parle que polonais c’est ça ? Du coup elle lui fait plaisir, et elle, anglaise qu’elle est, elle se contente des sous-titres ? ça colle bien cette version des faits je trouve… Non mais sérieux je dis pas ça parce que c’est son pote que j'arrive pas trop à renifler, mais ils servent à rien les polonais, on les vanne trop nous héhé, mais on y peut rien ils ont que dalle ce peuple … ou peut-être si : Lewandowski !! Mais c’est tout haha. Et même si j’ai un désir profond de savoir pourquoi, j’ai bien plus important à lui poser comme question, et finalement ça tombe sur elle et son hum … amant, sex-friend d’enfance ou je sais plus quoi. Et pourquoi elle est parti que vers le côté sexuel de la chose ? Genre je voulais savoir aussi comment il faisait pipi, comment il mangeait, s’il dormait aussi et s’il avait un compte twitter … elle pervertit vraiment mes intentions celle-là …« hop hop je t’arrête … Littéralement pour ‘baiser’, il faut deux individus de la même espèce –je précise- qui existe en chair et en os et produisent certaines actions dans un référentiel galiléen ... » j’ai juste ou pas les gars… ? « mais bon vas-y si t’as envie … » ça m’amuse plus trop de la contrarier enfaîte … « et à quoi il ressemble aussi, genre s’il est beau, musclé, tatoué et si il t’énerve à chaque fois qu’il parle … ?» peut-être qu’elle rêvait finalement de moi  héhé … « non mais sérieux à quoi il ressemble ton bonhomme … ? » J’écoute ce qu’elle me lâche sur comment ça se passe entre eux. Elle se couche. Elle ferme les yeux et puis elle pense. Bon ok je vais me lever là, c'est définitif parce que j’ai comme l’impression qu’elle se fout de ma gueule et qu’elle me prend réellement pour un con là. J’écarquille sans trop le savoir les yeux. Genre la meuf tellement elle est forever alone qu’elle s’est inventée un pote avec une bite. Non mais arrêtez moi je vais essuyer huit larmes là. « euh … Okeeey. » J’appuie avec un léger mouvement de ma tête pour lui faire savoir que j’ai compris. Qu’elle m’excuse hein, disons que c’est … assez difficile à visualiser ce qu'elle s'oblige à m'expliquer… « et … il baise bien ? » Je souris, réprimant un rire, un gros rire que j’arrive à bloquer par je ne sais quelle force intérieur. Je me rends pas compte que je suis entrain de parler d’un type qui n’existe même pas. Je sens que je vais perdre la tête aussi, elle déteint sérieusement sur moi la Ringo, sérieusement … Elle se tourne et me pose une question qui me fait reprendre mon sérieux. Si ça me dérange ? Naturellement. « Ouais. » oui ça me dérange ... et pourquoi ? Je sais pas. Mais ce que je comprends pas, c’est pourquoi vraiment cette question ?

Je souffle d'agacement. Il est sérieux quand il se comporte de la sorte ? C'est un peu comme s'il allait saluer Amédée en l'appelant le bâtard ou Gaïa en l'apostrophant d'un coucou la cul-de-jatte. On repassera pour le politiquement correct, c'est franchement méchant. J'ai l'impression qu'il me fait des reproches, mais je ne suis même pas sûre de les comprendre. C'est à lui de tout faire, il a oublié ? Je ne bouge pas, je ne prends aucune initiative et j'attends tout simplement qu'il se décide à s'occuper de notre relation tout seul. Moi, je suis l'étoile de mer qui ne fera jamais le premier pas vers lui. Je rougis de colère alors qu'il s'évertue à rabaisser toute mon histoire. Il m'énerve. Tellement que j'ai vraiment envie de le frapper. J'aurais sûrement l'air ridicule, je ne mettrais pas la force nécessaire pour que ça le cloue sur place, mais ça aurait au moins le mérite de faire entrer dans sa petite tête qu'il se doit d'être plus respectueux envers moi. Je bouge pas, gardant les yeux fermement rivés sur l'écran pendant que j'essaye de respirer. J'ai l'impression qu'il ne me comprend jamais. Je n'y peux rien à ma tare. Elle était là bien des années avant que je rentre sur l'échiquier et que je le rencontre. J'ai essayé de le préparer en douceur à cette révélation, glissant quelques indices ici et là, l'avertissant des raisons qui me poussaient à vouloir perdre ma virginité de la sorte. Je me doute bien qu'il ne devait pas s'attendre à une telle chose. Faudrait être un peu tordu pour s'imaginer qu'il est possible de tomber amoureux d'une personne qui n'existe pas.« C'est ... une sensation, pas un fantôme. Ca depend des fois. » je tente d'expliquer l'inexplicable en haussant les épaules. Parfois il ressemble à un acteur que j'ai vu dans un film, parfois à une personne que je côtoie. Ca n'a rien de troublant tant que j'ai conscience d'à qui je m'adresse. Je sens bien que plus j'essaye de m'expliquer, plus mon statut de disjonctée doit grandir dans son esprit. J'ai toujours su que j'étais folle, je ne patauge pas dans la négation. Je pourrais me faire soigner, mais c'est trop douloureux. Je crois que sans lui dans ma vie, j'aurais finit comme la fille que Sage et ses copines en escarpins Louboutin ont poussée jusqu'au suicide. Il me demande s'il baise bien avec son sourire de crétin que je jauge avec sévérité de mon petit air supérieur censé le faire se sentir comme un connard. « Il me laisse dans un bien mauvais état que certain. » je rétorque avec méchanceté. Fallait voir à quoi je ressemblais après avoir couché avec Jan. Les lèvres gonflées, la peau eraflée aux endroits où sa barbe naissante s'est frottée avec un peu trop d'insistance, des bleus là où il s'est appuyé de tout son poids et une certaine douleur dans le bas-ventre. J'aurais sans doute pu apprécier cet état lamentable que je n'ai remarqué qu'en affrontant un miroir s'il ne s'était pas barré dans la seconde en me laissant me démerder pathétiquement pour récupérer mes sous-vêtements qu'il avait balancé n'importe où. Ils ont bien du se marer devant leurs postes de télévisions. On est loin de l'idéalisation de mes rapports fantasmés, si bien que les deux ne sont même pas comparables. La réalité n'a pas la même saveur que l'imagination aussi belle soit-elle. Ca m'emmerde profondément d'avoir pu autant apprécier ces contacts physiques avec Jan. Je m'attendais à ce que ce soit moins plaisant, d'où l'idée d'un petit coup vite fait. Il est chiant. Dans ma tête c'est comme s'il avait tout gâché, m'obligeant à remettre en question ma relation sur le long terme. Il me confirme aussitôt qu'en effet ma tare le dérange. « C'est con. » je lance avec nonchalance, genre je me fous éperdument de son avis à ce sujet, alors qu'au fond j'aime bien le fait que ça puisse l'embêter ne serait-ce qu'un peu. Parce que depuis plusieurs jours j'ai l'impression d'être devenue en un instant une anecdote inutile de sa vie. Le jour où j'ai dépucelée une tarée qui me l'avait ordonné. Je n'ai jamais prétendue à un meilleur rôle, mais j'aurais préférée qu'il m'oublie plutôt une fois que je ne serais plus à traînailler sous son nez. Je me retourne à nouveau pour regarder droit devant moi les personnages en noir et blanc qui dansent tranquillement sur le mur avec un léger sourire satisfait. Je fais ma petite moue hésitante pendant que j'hésite à reprendre la parole. « Laisse tomber Mario et Carlos. Viens. » je craque en exigeant de ma voix parfaitement neutre qu'il me rejoigne sur le siège voisin sans un regard en arrière.

Elle m’énerve avec son air hautain. Que ça peut être sacrément chiant une femme quand même … Son esprit et sa philosophie de merde commence à vraiment me prendre la tête, et son attitude qui se veut être précieuse et demandée m’horripile légèrement. Franchement avec elle la femme devient une source d’ennui et d’agitation, et c’est ce que je déteste par-dessus tout. Ce genre de femmes, ce qui m’amuse quand il s’agit de les analyser de loin, c’est qu’on remarque que leurs actions les plus banales peuvent se rapporter à quelque chose de très grave, mais leur comportement extraordinaire dépend parfois d'une action négligeable. Vérdique. Je veux pas non plus qu’elle devienne quelqu’un de lourd et collant, mais limite elle peut quand même se bouger les fesses et commencer à faire des efforts, parce que ça la sauvera. A ce rythme je crois pas qu’elle évoluera, elle restera toujours cocon ou chenil à l’état moche et stérile, sans trop parler de son cercle social qui risque de ne jamais s’améliorer … ou bien de disparaître carrément. Si elle s’attend à ce que son répertoire se garnisse tout seul, c’est qu’elle est plus que tarée la petite. Elle serait en plus de ça, conne et sans cerveau réactif. Non mais bon sang maintenant que j’y pense, je l’ai jamais vraiment  vu sourire la Ringo, jamais … si ce n’est pour afficher un visage de petite peste, et ça me fait tout d’un coup peur, d’autant plus que l’idée a eu un sacré retard pour germer dans ma petite tête de blondinet. Jamais un seul sourire sincère, du genre accueillant et chaleureux. Flippant quand même !! Remarque elle est toujours là, à tirer la même tronche de coincée … et le plus sidérant c’est que ça doit bien la contenter. Je sais pas comment elle raisonne, et limite je veux pas savoir comment, mais … elle veut toujours rester ainsi ? Genre ça l’arrange elle de rester dans cet état demi-végétatif avec son compagnon qu’elle doit être la seule à en gober l’existence ? Si c’est le cas bah ça voudra dire que personne ne s’en souviendra d’elle, ce qui est plutôt dommage en vue du potentiel qu’elle semble avoir. Elle a plein de chose à partager, sauf que non elle s’obstine toujours à rester dans son coin à elle … et après c’est elle qui se plaint d’être toute seule et repoussée par tout le monde … Faut peut-être lui insérer dans le crâne l’idée que les gens ne l’évitent pas pour ses beaux yeux, mais bien à cause de son aura flippante qui ne lui apporte rien de salvateur. Au contraire ça la pousse à rester la putain d’épave qu’elle était. Et au fur et à mesure que je la côtoie, je me dis que si j’étais pas vraiment du genre sociable, mais vraiment vraiment sociable et grosse gueule qui suinte l’audace à trois kilomètre, identifié depuis mon enfance comme étant un prototype très ouvert d’esprit qui accepte autrui même avec les lourds défauts qu’il a et qu’il se trimballe ; je me dis que si j’étais pas de ce genre là, j’aurais jamais daigné à faire le premier pas en sa direction, tout simplement parce que … elle donne pas envie, voilà. Son état psychologique aussi, qui lui doit s’aggraver de plus en plus qu’elle m’en lâche les détails. Je crois que la vérité sur son compte, j’aurais mieux fait de pas la connaître. Ça aurait été mieux pour moi, pour elle, pour tout le monde aussi que je m’obstine à croire qu’elle a rien d’une disjonctée. Et genre son poto c’est pas un fantôme, ni un esprit, mais une sensation. Ok c'est bon on arrête là c'est mieux pour tout le monde.« et ça se soigne ça ? » Ouais j’espère pour elle que sa chorée a un remède sinon j’ai peur pour elle, pour son futur et sa vie privée, maintenant que tout le monde sait quels ont été les malheurs psychologiques de la petite dame. Et même s’il est clair que mon avis là-dessus demeure être le même que la majorité ici, j’essaye de me taper sa tête et alléger le tout pour que j’évite vraiment de me barrer définitivement en la prenant pour un cas psychiatrique fini. Si je me paye sa tronche, c’est pour essayer vainement de mon côté d’accepter la chose … parce que même si je vois bien qu’elle déconne pas avec cette histoire, moi j’arrive pas à tout gober, du moins pas pleinement … Elle me répond avec sévérité, comme si je le méritais vraiment alors que je ne fais qu’aborder le sujet à ma manière … Non mais elle s’attendait à quoi ? Que je l’invite docilement à venir s’asseoir à ma table pour qu’on discute du problème comme le ferait un psy avec son patient ? J’aborde le thème comme je veux, et elle doit s’estimer heureuse que ça soit sur un ton proche de la rigolade et la légèreté. « Certains ? Je croyais que t’avais eu qu’un seul rapport dans ta vie ? » Je souris … pas vrai les gars ou pas ? Ah ou bien …  « ahhh tu parlais de moi c’est ça ? » je pointe mon index en ma direction, sourire stéréotypé de débile sur les lèvres… Ah je vois elle faisait allusion à moi c'est ça ? Je pige enfin, mais je croyais aussi que je m’étais bien occupé d’elle … alala jamais contente et comblée les femmes … Et puis elle porte plainte pour rien la brunette ... « je t’avais trouvé bien plus sexy après l’acte qu’avant t’sais … » Elle était plus humaine, ou peut-être c’est parce qu’elle était nue, qui sait… Je devais d’ailleurs la prendre en photo avant, puis après et la mettre dans mon CV pour dire aux femmes de regarder Ô combien ils peuvent devenir plus belle en couchant avec moi … mais enfaîte j'ai abandonné l'idée, tout simplement parce que j’ai pas besoin de pub pour baiser moi … « c’est comme si … t’avais gagné en volume … » je ricane parce que je peux pas m’empêcher de rire face à ma vanne … Je suis trop drôle je sais …  Bon j’arrête de la taquiner un instant, avant de reprendre mon sérieux, sauf qu’elle me plombe avec sa réponse. Genre c’est con ? pourquoi c’est con ? Je trouve pas ça con de trouver dérangeant le fait qu’elle s’amuse à s’envoyer en l’air avec une ‘sensation’, d’après c’est dire … Y’avait bien mieux comme réponse, mais bon si elle veut … « t’as peut-être raison ouais … » J’affirme, à moitié rêveur et pas sûr de moi … c’est peut-être con ouais … peut-être … Et pendant que je réfléchis à ça, mademoiselle m’invite à la rejoindre avec sa voix bizarre … Mais pourquoi ? « T’as eu mal à la nuque à force de te retourner ? » Je sais bien qu’elle veut pas se retourner, mais j’imagine bien la tête qu’elle fait … genre énervée et sur les bords de la crise de nerf … Je suis énervant je sais … mais avec elle c’est plus au moins amusant. Un jour je vais la pousser à la crise cérébrale, je suis quasi-sûr de cette éventualité. Je m'adresse une enième fois à mes deux sièges respectifs « Bon les gars, je vais devoir vous abandonner … y’a une groupie qui m’appelle … vous inquiétez pas je garde un œil sur vous … » Je parle à mes potes, y'a un problème ? Moi aussi j'ai le droit d'avoir des potes imaginaires non ? Je trouve les miens un peu trop cons parfois. Et je me suis mis comme objectif de l’énerver, c’est clair maintenant … « allez ciao les filles … » haha que je suis drôle, et je me lève pour sauter au dessus des chaises et me poser brusquement sur le siège voisin de la demoiselle. J’enfonce naturellement mes mains dans mes poches, avant de glisser nonchalamment sur le siège, portant mon regard sur elle avant de refixer l’écran … euh qu’elle me rassure, je vais pas passer mon temps à regarder cette saloperie jusqu’à la fin j’espère ?

Il l'appelle ça. Un peu comme s'il n'était qu'une vulgaire faille, une chose  sans sentiment, sans importance, ce qui me fait légèrement trésailler de stupeur. C'est pas parce que pour lui il n'existe pas, qu'il a le droit d'être irrespectueux à son égard. Cette désignation me choque, mais je me doute bien que Jan est incapable de saisir ce que ça représente pour moi. Sinon il n'oserait pas me demander si ça se soigne aussi facilement que si j'avais attrapé une grosse bronchite. J'aurais beau m'expliquer de long en large, lui raconter comment tout a commencé, le rapport étrange que j'entretiens avec ma famille, ma difficulté à me lier avec de vraies personnes, jamais il ne comprendra pourquoi je m'y accroche de cette force. Ce n'est pas que négatif, cette relation m'apporte également une certaine part de bien-être. « J'imagine que oui... » je lui réponds vaguement dans un haussement d'épaules. La question n'est pas vraiment de savoir si c'est guérissable, mais plutôt si je veux arrêter de le fréquenter et de le voir dans ma tête. J'ai conscience que mon mode de vie est malsain. Vivre sans vivre, n'agir que fictivement dans mes rêves sans ne jamais rien réaliser dans ma vraie existence. Je crois que participer à Prima Luce était avant tout une façon de me confronter au problème. Sauf qu'on ne peut pas dire que j'ai véritablement géré le déroulement de mon aventure en m'évertuant à m'isoler du reste des candidats. Je ne peux pas espérer qu'ils m'aident si je ne fais rien, mais s'ils ne m'aident pas je ne fais rien. Foutu cercle vicieux, j'ai l'impression d'être piégée dans mon état asocial avec mon fantasme imaginaire et que rien n'est capable de tout décoincer. Il fait son abrutit lorsque je mentionne notre rapport se désignant même du bout du doigt. Merci, je sais qui est l'unique personne avec qui j'ai couché. Comme le monde entier d'ailleurs puisque la production a eu la bonne idée de rappeler cet épisode au cours du prime. Genre ça n'aurait pas pu suffire de diffuser les images de la couette ondulant à un rythme régulier une seule fois. D'après lui j'étais plus attirante après qu'avant, ce qui me fait faire une moue dubitative. Ca parait normal, il devait se féliciter de l'état dans lequel il m'avait mis. C'est comme le sexe, si on observe l'acte d'un point de vue extérieur, les orifices béant, la chair, les poils et la peau moite prennent une toute autre tournure lorsqu'on est pas dans cet état d'esprit. Sa reflexion suivante me fait m'empourprer violemment et confirme qu'il est définitivement un véritable idiot pour oser ce genre de vannes douteuses. Il a fait pire, mais je ne suis pas dans un état capable de supporter sa connerie habituelle. Sauf que Jan doit ignorer jusqu'à la signification de sérieuse comme j'aurais souhaité que cette conversation soit et je suis donc obligée de supporter ses reflexions agacantes pendant que j'essaye de lui parler. Bien sûr que c'est con que ça le dérange. Parce que c'est bel et bien présent, il n'y a rien à faire pour le débarrasser de cette gêne car dans l'immédiat il n'est pas question que ça change. Ca ne va pas disparaître aussi facilement. J'ai mon petit sourire heureux de savoir qu'il ne se fout pas encore assez complètement de moi pour que mon état psychologique ne le trouble pas. Je vire mon air enchanté pour lui proposer placidement de me rejoindre. Ce crétin pense que ce n'est que parce que je suis énervée de devoir tourner sans cesse la tête, oscillant entre lui et l'écran, mais je serais parfaitement apte à poursuivre un dialogue sans l'avoir sous les yeux et à continuer de mater mon film. C'est cette capacité propre aux femmes de pouvoir faire plusieurs choses en même temps. Ou alors c'est une manifestation de mon côté asociale, faut voir. Je soupire en l'entendant s'adresser à ses faux amis imaginaires. Il est vraiment débile quand il s'y met, il m'énerve. Il se hisse par-dessus les sièges, fait tout trembler pendant qu'il s'affaire à les enjamber ce qui me fait lever les yeux au ciel face à son indélicatesse flagrante et finit par se laisser tomber à côté de moi. Je me tais et prends plaisir à le laisser languir de la sorte. Jan déteste le silence, encore plus les longs moments sans bruits presque pesant comme celui que je l'oblige à endurer avant de daigner me remettre en marche. Je glisse une mèche de mes cheveux derrière mon oreille pour ensuite les ramener d'un côté afin de dévoiler mon cou. « Regarde. » Je me tends un peu plus pour le laisser analyser les grandes lettres en majuscule censée former son prénom. C'est pas évident de le deviner dans un premier temps, ça ressemble plutôt à des signes tirés de l'alphabet cyrillique parce que je me suis bien plantée en m'appliquant à les inscrire sur ma peau en me regardant dans miroir. J'ai dû utiliser le même marqueur indélébile qu'il avait pris pour écrire sur son bras la semaine où j'étais nominée. Impossible d'effacer mon erreur d'idiote qui veut trop bien faire les choses. J'ai l'air un peu con, mais on devine quand même pas vrai ? Si je me mets en face d'une caméra ou lorsqu'on me demande de me confesser sur un sujet ou un autre dans la maisonnée du buzzeur, il est quasiment impossible de passer à côté de son prénom qui s'étale sur mon cou. Alors évidemment je ne me darde pas de pouvoir lui apporter de nombreux votes, mais c'est l'intention qui compte et l'intention se moque des écritures faites à l'envers. J'aimerais bien qui gagne. Déjà, ça serait tout de suite mieux si le mec avec qui j'ai eu ma première fois était le vainqueur d'une émission et pas juste un type plus vieux que moi et un peu idiot. Et ensuite, Jan... Je l'aime bien quand même, mais j'ai trop de fierté pour le lui dire ou le lui montrer clairement. A la place j'ose une prise de parole quelque peu hésitante et toute en prudence. « Tu crois qu'on pourrait se revoir une ou deux fois à l'extérieur ? » Genre... Juste comme ça, quoi.

Dieu soit loué son truc à un remède. Mon naturel compassionnel excessif me pousse même à éprouver un léger soulagement causé en autre par la nouvelle. Une bonne nouvelle nan ? Sauf qu’elle est pas trop emballée par l’idée de se faire soignée, genre … Elle aime bien son état actuel ? Elle trouve que ça fout d’elle quelqu’un d’unique d'être vu ainsi ? Ou bien elle a pas l’argent nécessaire pour se faire soigner … ? Une autre variante me pousserais à déduire qu’elle participait pour réunir l’argent et soigner son cas spécial. Sauf que je crois pas trop à cette supposition, puisque j’avais entendu par le bias de certaines voix fuyantes qu’elle était issue d’une famille aisée, chose qui me pousse à revoir mon théorème … D’ailleurs elle doit être vraiment riche la Ringo nan ? Si elle avait vingt ans plus avec un cancer du cœur ou une saloperie mortelle de la même famille, je l’aurais direct épousé pour attendre qu’elle crève et lui piquer son fric … Non mais même, son truc avec 'fantasme' et 'sensation' c’est pire qu'une leucémie pour moi … Et le plus sidérant c'est qu'elle a vraiment pas l’air de vouloir en finir avec lui, ce qui me pousse à lui demander naturellement suite à son petit haussement d’épaule, qui en dit bien plus sur ses envies qu’autre chose… « je suppose qu’il doit être important pour toi c’est ça ? » Genre on aurait dit qu’elle vivait à travers ce type imaginaire, ou plutôt qu’elle s’accrochait à lui pour vivre et foutre sa vie. Bouleversant. Je me demande même qu’en plusieurs années d’existence, sa ‘’sensation’’ que je tends à surnommer la ‘’chose’’ tellement c’est une saloperie inexplicable chez moi, est surement devenu un composant essentiel de sa piètre existence qui doit se résumer à … bah à lui tout court, comme si c’était un symbiote impossible à enlever. « Tu sais un jour arrivera où tu seras obligé de dire au revoir à ton pote … tu le l’sais ça ou pas ? » Sauf si elle veut toujours rester la Ringo au caractère proche de la chiotte de chien et avec une vie minable. Personne voudra se marier avec elle … ou peut-être un schizophrène suicidaire, au pire ... donc autant lui dire bye bye maintenant quoi … Du moins pour son propre bien … D’ailleurs je sais pas pourquoi je me soucie de son cas, comme si mon excès de volonté à aider autrui et à le voir dans une meilleure situation gagne sur mon petit cerveau de big branleur qui m’aurait dicté de m’en foutre carrément de sa pseudo-maladie psychiatrique. C’est fou j’ai l’impression que ça deviens limite un souci alors que … ça devrait pas. Et ça c’est pas seulement avec Ringo, mais avec tout le monde. Faut absolument que je sache que la personne est normale et va bien sinon ma conscience n’est pas tranquille. Ça s’explique pas, c’est comme ça, à moitié protecteur, à moitié humain … genre une sorte de commisération profonde qui intervient naturellement, plus fort que moi. Donc la voir ainsi, tourmentée psychiquement me prends légèrement la tête, au point que ça me démange. En math, Ringo est un putain de nombre complexe, avec sa partie réelle et sa partie imaginaire … [...] ... Oh mais j’adore cette comparaison !! ça vient d’éclairer mon esprit tellement c’est ça !! Bordel j’ai l’impression de raisonner comme un énarque philosophe expérimentaliste doublé d’un génie consanguin issu d’un rapport interdit entre l’arrière grande mère d’Euler et la frère utérins de Riemann. Non mais elle est trop forte ma déduction … Je décide néanmoins de tourner la discussion à ma manière, sur un ton ultraléger en la taclant à l’infini, seule chose que je maîtrise parfaitement. Je sais bien qu’elle aime pas qu’on parle de sa partie de jambe en l'air, non pas parce qu’elle s’est produite avec moi, supposé être la personne qui l’énerve le plus au monde –maintenant c’est plus trop crédible ma petite-, mais surtout vu que la galaxie entière l’a vu. Je vois bien qu’elle est pas très à l’aise avec cette donnée, mais fallait alors réfléchir à ce paramètre jolie demoiselle avant de demander inconsciemment de baiser avec sa majesté Jan. Et ce qui me fait encore rire, c’est son petit comportement de princesse qu’elle met en scène, comme si je n’étais que son vulgaire bouffon présent ici pour amuser la table. Franchement le rôle ne m’intéresse pas, mais je me surprends à m’y plaire, comme si mon esprit de challenger de la drague s’était mis à l’opposé et s’était mis en deal avec lui-même pour voir à quel point je pourrais résister. C’est trop compliqué. J’ai l’impression d’être en confrontation durable avec mon  doppelgänger. Je suis au bord du trouble dissociatif de l’identité. Pour l’instant ça ne s’est pas encore produit, mais je présage le pire. D’autant plus qu’elle continue toujours à me prendre pour un crétin, ce qui est fatiguant à force, jouant de son état de petite fille précieuse. Ok. C’est moi le finaliste, et c’est elle la merde. Logiquement, c’est l’inverse qui doit se produire, c'est-à-dire JE passe au premier rang, et c’est elle qui doit reculer pour que je lui parle le dos tourné, comme si elle n’était qu’une vulgaire groupie comme les autres. Sauf que non, je comprends pas pourquoi je la laisse jouer son petit rôle qu’elle tient tant à théâtraliser devant les caméras. Elle aime bien que je me plie à ses caprices la gueuse, et elle y joue bien. Surtout quand elle me dicte de venir s’asseoir à ses côtés, je réfléchis même pas et comme un pauvre toutou je me bouge pour atterrir près d’elle. Genre j’ai pas pensé une seule fois à l’envoyer chier ailleurs … intriguant quand même. Du coup je me bouge et je pose mes fesses à ses côtés, fixant l’écran à la noix qui demeure à présent être la seule attraction potable du moment… Alors il se passe quoi maintenant ? Elle m’embrasse, elle pète, elle me retire sa culotte pour que j’en fasse un beau souvenir ? Non mais j’sais pas qu’elle fasse un truc, allez … J’aime pas attendre comme un gland comme ça, et voyant que ça dure, je pivote vers elle pour la questionner à propos d’un truc … « Dis … » connerie en approche, à présent elle connait le mode opératoire … « Si tu te suicides ... ça comptera vraiment pour un suicide, ou bien … pour un meurtre ? » Haha que c’est con, mais je trouve que c'est  philosophiquement intéressant. J’ai l’impression d’être le père de Spinoza maintenant. Je souris bêtement, avant de refixer mon écran pour calmer mon petit rire. Que c’est chiant ça … C’est quoi ce putain de film ? Elle regardait vraiment ça ? Je commence à me poser de sérieuses questions sur elle. Et là, miracle, elle bouge, dégageant l’énorme buisson que formait ses cheveux derrière ses oreilles pour me montrer un truc. Du moins elle essaye d’attirer mon attention sur ce même truc, mais je fais semblant de pas voir … Genre là je refais mes lacets pour qu’elle reste bloquée ainsi comme une conne. Faut que je supprime mon rire avant de me présenter à elle, et je profite de ce temps mort pour virer les dernières empreinte de mon sourire crâneur. ça a l'air sérieux tout ça. Je me relève pour diriger enfin mon regard vers elle, sourire sur les lèvres. Alors qu’est ce que c’est cette nouvelle lubie … OH ! Mon prénom est sur son cou !!  Ou plutôt … JAN  … Je tourne même la tête pour lire cette fichue inscription … et après avoir largement eu le temps d’analyser l’écriture, je chope son menton pour l’approcher en ma direction et déposer ainsi un énorme bisou de bisounours sur sa joue toute mignonne … Le truc trop guimauve mais hyper bien exécuté qu’il pourrait la vexer d’être aussi nulle en baisers… Rien à voir avec son micro-bisou sur ma mâchoire au moment ou j’avais marqué son prénom sur mon avant bras. Je fais pas les choses à moitié. Je me pose même pas de questions sur sa visibilité qui doit être vraiment nul, ni de son emplacement douteux, et je me vois submergé par une infime joie qui s’affiche tel un rayonnement sur ma trombine de macaque. « Il est trop moche … mais j’adore ! » On va pas se mentir elle doit pas être à l’aise avec des crayons celle-là, limite elle gère mieux les bites que les feutres mais le geste me fait terriblement plaisir … « Non mais j’étais sûr que t’étais une groupie … » elle vient de signer son arrêt de mort là, fallait pas qu’elle me le montre … Erreur fatale héhé … Je suis même prêt à la nommer présidente de mon fan club, mais elle coupe mon élan pour me poser une question si joliment décorée avec sa moue dubitative très sexy… Si on pourrait se voir à l’extérieur ? C’est quoi cette question merdique ? « Bah y’a 50% de chance que ça arrive t’sais … » j’fais genre je suis pas très sûr de la revoir, je serrais trop pris, contrainte de temps, buisines, signature d’autographe, blanchissement de meufs … bref elle connait la routine, et je théâtralise même une mine dépitée pour lui faire craindre le pire … « tu sais pourquoi ? parce que moi je suis d’accord ! » haha j’aime toujours l’effet et la chute qu’elle fait celle-là … Je la sorts toujours quand je propose à quelqu’un de coucher avec moi, hum … Bien sûr qu'on va se revoir, parole de Jan. « tu comptes faire quoi après d’ailleurs ? » A vrai dire pour le moment je m’en fous carrément de sa réponse, voir je suis pas trop sûr de l'écouter tellement je suis absorbé par le dessin sur son cou … ça me fait d’un coup drôlement plaisir de le voir, logé sur sa peau luisante, au point que j’ai envie de l’effleurer des bouts des doigts, de le fixer même le plus longtemps possible … A vrai dire je m’en lasse pas, par ce que c'est magique ... c'est bizarre mais ça donne la pêche ce truc…

Il est un peu crétin le Jan quand il s'y met. Ou alors il n'écoute jamais ce que j'ai à dire. Ca ne m'étonnerais pas à vrai dire, son cerveau ne doit que capter les mots qu'il reconnait. Quand je lui demande s'il veut qu'on baise j'ai toute son attention, mais quand je tente d'expliquer les raisons de mon problème il n'y a plus personne. J'ignore si c'est de l'ennui ou une sorte de déni parce que je le vois bien que ça le dérange sérieusement mon délire de sensation, mais dans tous les cas il ne s'y intéresse pas. Je lève les yeux au ciel lorsqu'il me demande bêtement si je tiens à mon homme imaginaire. Parce que non, il fait partie de toute mon existence depuis que j'ai l'âge de sept ans, j'en suis amoureuse et je me ferme à ce qui m'entoure pour pouvoir le sentir près de moi aussi longtemps que possible, mais en réalité j'en ai rien à foutre de lui. Il est con franchement parfois. Je hoche doucement ma tête en silence en guise de réponse, me mordillant la lèvre nerveusement. Il en rajoute en me rappelant qu'un jour je serais obligée de l'abandonner ce qui me donne surtout envie de me retourner pour le fusiller du regard. Il est chiant à avoir raison. « Je sais. » je gémis d'une voix plaintive. J'ai parfaitement conscience que ça ne pourra pas durer éternellement et c'est bien ça qui m'embête. Parce qu'un jour il va falloir que je me décide à me soigner, mais je me sens pour le moment strictement incapable de faire le premier pas en faveur de cette guérison. « Je n'ai pas d'amis. Pas de famille... » Théoriquement c'est faux, mais je ne saurais qualifier les liens que j'entretiens avec mes parents de familiaux entre mon père qui se trouve toujours à l'autre bout du monde tout au long de l'année ou la relation conflictuelle que j'ai avec ma mère qui me rappelle dès qu'elle en a l'occasion ô combien je peux être médiocre. « C'est difficile de prendre l'initiative d'abandonner, comme ça... » Je fais un petit signe avec mes mains du genre "POUF". Parce que c'est un peu le principe. Il disparaîtra définitivement, il n'ira pas autre part, il n'existera plus simplement. Parce que déjà qu'il n'existait pas beaucoup, mais alors là ça ne sera plus du tout même pas dans mon imaginaire. Il deviendra peut-être un souvenir qui au fil des années s'estompera jusqu'à devenir quelque chose de pâle, sans grandes saveurs, même s'il représentait absolument tout pour moi pendant plus de dix ans. Je vois bien du coin de l'oeil qu'il commence à s'agiter sur son siège. Pire qu'un gamin, il ne peut pas tenir cinq minutes sans sortir une connerie et se concentrer tout simplement sur le film. Alors d'accord c'est en polonais, mais il ne peut pas juste regarder les images sans déconner ? Il réclame mon attention et je tourne ma tête avec un air d'ores et déjà dubitatif alors qu'il n'a pas encore ouvert la bouche. Je le connais maintenant, je sens quand il va me sortir une énorme connerie en me fiant uniquement à l'expression de ses yeux qui trépignent d'impatience. Il lâche sa vanne sous mon regard offusqué. C'est drôle, mais toujours limite. D'ailleurs, je commence à m'inquiéter de l'effet que l'humour de Jan à sur ma personne. Cet abrutit déteint sur moi. Ses blagues m'apparaissent comme moins agaçantes, mais je ne peux pas me permettre de sourire sinon il irait s'imaginer tout un tas de trucs et prendrait confiance. La mort et le suicide ne m'ont jamais effrayés. Si on a rien auquel se raccrocher, vivre n'a aucun intérêt. Je ne suis pas croyante, je ne pense pas que quelque chose nous attend de l'autre côté, mis à part le soulagement de ne plus penser. Au fond, on ne sait même pas qu'on est mort, qu'on s'est fait écraser par un bus ou bouffer par un loup sauvage, alors... « Il ne me tuera pas. » je rétorque d'un ton parfaitement sûr de ce que j'avance. Vivre avec un homme imaginaire est malsain, mais notre relation en elle-même est parfaitement normale. Je lui raconte ce que j'ai fait dans ma journée, on s'embrasse gentiment, on discute... Ce n'est pas une histoire passionnée et compliquée, mais plutôt quelque chose de simple, frais et agréable qui me permet de me sortir de mon quotidien pesant. Je pense souvent à ce que je manque en me noyant dans celle-ci, je me demande sans arrêt si je devrais essayer d'y remédier, mais jamais en sa présence. Lorsqu'on est que tous les deux, c'est parfait et dénué de problèmes. Le genre de relation où on n'essaye pas de zigouiller son partenaire ce qui explique bien mes difficultés à me décider à me soigner. Je dévoile mon cou avec quelques réticences. J'ai envie de lui faire plaisir, mais ça m'embête un peu aussi. Je ne suis pas habituée à faire ce genre de choses pour les autres. D'autant plus que mon soutien n'est qu'anecdotique puisque je ne pense pas inciter des centaines de personnes à voter pour lui. Je ne suis personne, il n'a sûrement pas besoin de mon aide pour se hisser jusqu'au statut de gagnant. Je suis obligée de tendre mon cou jusqu'à ce qui daigne regarder ce que j'ai à lui montrer. Parce que oui, monsieur à soudainement tout un tas de trucs à faire qui ne comprend pas observer ce que j'exige qu'il observe. Il lève enfin la tête et m'attrape brusquement pour déposer un gros bisous humide sur ma joue qui me fait immédiatement m'empourprer. Je le repousse doucement en posant ma main sur son torse pour l'écarter. Une vraie sangsue ce mec, j'aurais presque pu m'essuyer la joue. Je ne suis pas habituée aux contacts physique, ça me fait toujours bizarre de le sentir contre moi. C'est plaisant sous certains aspects, un peu moins quand je prends conscience qu'il s'agit de Jan et qu'il ne faut surtout pas qu'il se rende compte que j'aime bien quand il me touche pour ma fierté personnelle. Il commence déjà à me qualifier de groupie ce qui me fait lever les yeux au ciel pendant que je réadopte une position avachie. Je lui demande timidement s'il aimerait qu'on se revoit une fois sortie du jeu en me triturant les mains. Pour la plupart des candidats cette requête peut paraître atrocement stupide tant la réponse est évidente. Ils sont tous déjà BFF, amoureux... Ce n'est pas mon cas. J'aurais tout autant pu demander à Jan s'il voulait devenir mon ami comme les gamins de huit ans le font, âge auquel j'ai cessé de m'investir dans les relations humaines, parce que je ne suis pas sûre que c'est ce qu'on est. Je baisse les yeux lorsqu'il parle d'uniquement 50% de chances que ça arrive quelque peu vexée. Je suis sûre que je le fais flipper comme les autres. Je suis la tarée qu'il faut éviter de la saison. Il reprend la parole et se décide enfin à me lâcher qu'il est d'accord. Je me rapproche de lui discrètement, laissant ma jambe toucher la sienne pendant que je lorgne sur son bras allongé sur l'accoudoir. « J'sais pas. Je vais rentrer chez-moi. » Et c'est tout. Je ne suis jamais parvenue à me projeter dans un avenir plus ou moins proche à cause de mon léger problème, je suis incapable de dire pour le moment ce que je compte concrètement faire de ma vie.« J'ai exécuté deux des objectifs majeurs de ma vie de fille de stars. Participer à une émission de télé-réalité et réaliser une sex-tape. » j'explique en laissant mon doigt glisser sur sa peau d'un air absent, slalomant sur les courbes de ses tatouages. « Qu'est-ce que tu vas faire toi mis à part choper le numéro de ta casteuse ? » Ouais, parce que cette histoire ne m'a pas échappée. J'ai l'impression qu'il ne parle que de cette greluche rousse et je dois avouer que ça me fait un peu chier.