Hinarani - vers 18h

Au fur et à mesure que le temps passe, que le nid se vide, je me dis que Jan, bon citoyen de l’échiquier comme tu es, tu n’as jamais mis les pieds, voir un pied seulement à l’église. J’imagine déjà les lois divines s’abattre sur moi, avec la voix qui porte jusqu'à la troisième galaxie, le ciel qui se déchire pour former une bouche de vieillard et qui te vomi un discours synonyme de courroux. Euh ouais j’ai vraiment intérêt à voir à quoi ressemble l’intérieur cette bâtisse, au moins juste une fois pour avoir terminé les 100% de tous l’échiquier. Je parle de la partie pion bien sûr, parce que la villa j’y suis à 6% même pas. Je flâne donc jusqu'à arriver devant la porte que je pousse avec lenteur, jetant un coup d’abord à l’intérieur, avant de me glisser silencieusement, sans faire de bruit. Je sais pas comment ça doit se passer dans la religion, mais il parait qu’il faut pas faire de bruit. Hors moi le bruit je peux pas m’en passer. Et merde là j'ai envie de péter pour le coup. ça arrive toujours dans les mauvais moments. Je fais un tour avant de déposer mes yeux sur la silhouette longiligne d’Hina, installée au loin sur un banc. Bizarre quand même. Ou plutôt, drôle de figure pour un drôle de lieu je dois dire. Je réduis la promiscuité pour me placer juste derrière, dans le banc de derrière, ne sachant pas vraiment comment l’aborder … J’ai jamais abordé quelqu’un dans une église, c’est tout nouveau pour moi … D’ailleurs qu’est ce qu’elle fout ici ? Elle est venu prier des salades ? Elle venu se repentir ? Soudoyer jésus avec son corps de rêve ? Faut voir parce que bon … Elle est hors contexte la petite bombe là … Je dépose mes bras sur le banc de devant, mon menton dessus avant de lâcher en sa direction un simple « ca va ? » presque naturel. J’ai tellement de questions à lui poser, mais je sais pas par quoi commencer, du coup je commence par rien et je me tais …

J'entre dans l'église. Je reste dans mes gros vêtements version yéti, une doudoune blanche sur le dos, avec de la grosse fourrure – fausse évidemment – sur la capuche. J'entre là parce que j'ai froid, vraiment, pas parce que c'est une église. Qu'est-ce que je ferais dans une église ? Je ne suis pas une bonne sœur, ni une fana de Dieu et Jésus son fils. Pourtant je me laisse emporter par le lieu, enfin ça ne m'intéresse pas, mais je me laisse guidée dans l'allée principale, puis sur un banc. Je regarde devant moi, rien en fait, j'essaye juste de me réchauffer. Un bruit se fait entendre, ce qui me fait tourner la tête lentement, mais immédiatement, avant de poser de nouveau mes yeux devant moi. J'ai bien vu qu'il s'agissait de Jan, mais qu'est-ce que je vais faire hm... Je souffle dans mes mains. J'entends ses bruits de pas, s'arrêter près de moi et puisque je ne le vois pas, j'en déduis qu'il est plutôt derrière moi. Gagné, parce que je sens sa présence et aussi parce qu'il me demande si ça va... Comment ça peut aller... J'en sais rien comment je vais, mal ? Non se serait abusé quand même, mais je ne pète pas forcément la forme. Je me demande ce que je fous encore dans cette émission qui m’affaiblis de jour en jour. Qui peu à peu m'isole dans une bulle de merde que je rêve de percer pour pouvoir refaire tout ce que je veux. De la bronzette, la fête, du surf, voir mes putains d'amis parce qu'ils me manquent là. Je suis une sorte de pastiche de la Hinarani qui est entré dans le jeu, avec moins de piquant, moins de mordant, moins de méchanceté même. Ouai, j'suis un vrai légume quoi. Et ce encore un peu plus depuis l'autre nuit... Je hausse les épaules, lui répondant simplement : « Ca va... Et toi? » Je ne suis pas encore du genre à me plaindre quand un truc ne va pas, ou à déballer tout mes malheurs à quelqu'un, même à Jan... Heureusement. Manquerais plus que je devienne comme ça et là, j'aurai touché le fond. Déjà que je me suis trop montré sensible et... Inexpérimentée, avec lui. Je tourne légèrement ma tête de son côté, pour lui demander tout simplement : « Qu'est-ce que tu fais dans une église? » Non parce qu'autre l'église, c'est clair que c'est pas ma place, mais autant bah... C'est pas la sienne non plus. D'ailleurs je dis directement : « Je sais que tu vas me reposer la question, alors je te réponds tout ce suite : Moi j'en sais rien, c'est la première fois que je viens là ! »

Elle répond nonchalamment, et j’en déduis que ça doit pas être la joie dans sa vie en ce moment, ce qui est d’ailleurs compréhensible. Je vais pas m’attarder sur ça parce que ça m’embête et que je suis pas venu me pencher sur elle juste pour m’auto-plomber l’humeur avec ces histoires… C’est bon j’ai passé à autre chose, j’ai renoncé à ce sac à problème, définitivement et je me porte bien en ce moment, mais je dois l’admettre que ça me manque. Ouais ça me manque. Elle me manque, et je n’ai pas oublié notre nuit, notre si torride nuit qui m’a encore une fois influencé dans mon attitude à venir la voir, même si j’aurais pu l’ignorer. Faut croire qu’il existe encore quelque chose, c’est bizarre, ça ne se terminera jamais … « Franchement je m’en branle de cette église ; par curiosité j’y ai jeté un coup d’œil, je t’ai vu et je suis venu, y’a pas plus simple enfaîte … » Je l’aurais vu aux toilettes j’aurais bougé mes fesses pour venir la voir, parce que tout simplement j’avais envie de la voir et de passer un moment avec elle. C'est tout. Après tout je me dis que, même si elle m'a fait tant de chose, même si elle m'a tellement déçu, trahi et tout ce qui a de plus abominable à faire à un conjoint, elle reste ma partenaire de jeu et ma partenaire d'il y'a six ans. Et puis je crois aussi que le cerveau commence à me dire que c’est peut-être nos derniers moments ensembles, qu’on a pas assez profité, alors qu’on devait … J’ai pas mal de remords enfaîte, mais bon c’est ainsi. Je néglige son blabla avant de pivoter la tête vers elle … «  faut dire que j’avais besoin de te voir … » Dans mon élan, j’ai tellement envie de la questionner sur notre nuit, et voir si elle a apprécié compte tenu des craintes qu’elle affichait, et est-ce qu’elle a senti ce truc que j’ai senti aussi … Est-ce que c'était réciproque, ou bien juste dans un sens ... D’ailleurs je sais pas comment à évoluer notre lien après cet échange que je n'oublierais certainement pas, s’il a été renforcé, ou plutôt s’il s’est encore plus compliqué qu’avant. Mais je m’en abstiens pour lui souffler tout simplement, mine de rien, à moitié intéressé … « dis, tu comptes faire quoi une fois tout que tout ça sera terminé ? » Les perspectives d’avenir sont plutôt vastes après une téléréalité, mais je me dis qu’elle va surement s’exiler chez elle, ce qui me gêne sans pour autant vouloir l’avouer, car elle sera loin de moi. Bon je suis grave intéressé par la réponse enfaîte, même si je fais semblant de pas l’être. Et pourquoi je dis ça ? Parce que la fin approche ? Surement, mais parce que je me soucie aussi de ce qu’elle compte devenir, ce qu’elle planifie et ce qu’elle a dans sa tête, tout court … Une première ouais.

Alors comme ça, il est venu vers moi. Lui qui m'a juste ignoré pendant quoi ? Au moins deux bonnes semaines, voire même trois, maintenant il vient vers moi. Je ne comprend plus rien et ça me saoule... Alors quoi ? Il aurait peut-être fallu que je baise avec pour avoir un peu de considération. Ca m'énerve, mais je ne peux pas paraître énervée, au contraire, j'en profite. Mine de rien, ça fait du bien d'être à ses côtés. J'ai l'impression de ne plus être pareille depuis cette nuit, mais c'est trop tard maintenant. Il me dit alors aussi qu'il avait besoin de me voir. Je tourne doucement ma tête pour croiser ses yeux, muette. Je ne dis rien, mais mes yeux étonné doivent être suffisamment parlant. À la fois je me demande s'il se moque de moi, ou si c'est véritable. Pourquoi il a besoin de me voir, si c'est juste comme ça ou pour des raisons plus concrète. Je ne dis effectivement rien, mais un sourire se dessine doucement sur mes lèvres. Un léger oui, pour qu'il soit le seul à le voir, attendez, la honte si la caméra voit ça. Déjà qu'elle a tout filmé depuis le début du jeu et notre nuit aussi, alors pas ça. Et puis une question tombe, comme ça. Ce que je compte faire une fois tout ça terminé ? Bonne question et en même temps, un question qui attend une réponse un peu évidente. Qu'est-ce que je pourrais bien faire après ça ? J'étais venu ici avec dans l'idée de m'amuser, de prendre des vacances, mais c'est pas ça qui s'est passé. Je suis lessivée et le froid m'a cassée (à défaut de m'avouer que c'est aussi un peu Jan, qui m'a cassé). Je lui répond doucement : « Qu'est-ce que je pourrais faire ? A part reprendre ma vie d'avant... » Tahiti et ma place d’hôtesse de l'air. La plage me manque et tout ce que l'on peut y faire et puis il faut bien je travaille. « Je pourrais peut-être profiter de cette notoriété pour gagner plus de fric, mais c'est tout... » Je hausse les épaules. Je vais faire comme avant quoi, même si au final, quand j'y pense, ça indiquerait de se retrouver à nouveau loin de lui. Mais si moi ça me fait quelque chose, lui ça ne doit pas lui faire grand chose. Déjà qu'il me pose cette question, mais n'a pas l'air plus que ça intéressé. J'aimerais du coup lui demander un truc, mais c'est ridicule. Parce que dans ma tête, c'est tout. Ca a été clair, je ne peux plus rien espérer, je l'ai perdu c'est tout... Même après mettre tout simplement « donnée » à lui cette nuit-là. C'est ridicule, mais c'est comme ça que je vois les choses. J'ai jamais accepté de faire l'amour qu'avec un seul et encore... Et puis lui, Jan, c'est pas rien. Je baisse les yeux : « Tu crois que... Qu'on pourrait continuer à s'écrire...? » Je lui demande dans presque un chuchotement, sans oser le regarder. J'ai peur, oui franchement, qu'il se foute de ma gueule. Comme moi j'aurai pu le faire à sa place...

Son sourire me fait drôlement plaisir, c’est comme un éclat qui intervient à un moment de pure pénombre. Ça fait du bien de le voir, preuve qu’elle a pas perdu tout son charme. Je me gratte l’arrière du crâne quand elle lâche qu’elle compte retourner à ses anciennes occupations, reprenant son job d’hôtesse de l’air comme si l’aventure prima luce ne lui avait rien rapporté. Elle parle de profiter de la notoriété et de l’aura que lui donnera l’émission … mais comment ? Genre elle compte vendre son corps pour de l’argent facile ? Vendre des shoot ? Faire des interview ? ça sera que peu suffisant, ou juste salissant … ça me dérange d’ailleurs, je sais pas pourquoi, comme si j’avais toujours envie qu’elle soit en ma possession alors que je peux pas la posséder entièrement … ça me fait chier quand même d’entendre ça, mais je rapplique aussitôt « t’en a pas marre de ta vie d’avant ? » ouais je demande, parcequ’on a un peu tous marre de vivre notre ancienne vie, et qu'on veut passer à autre chose, à un autre cap, ou bien est-ce seulement moi qui a ce genre d'idée ? ce genre d'envie de prendre un nouvel envol, une nouvelle vie avec un nouveau mode de vie qui demande du sérieux et de l'implication ? Par exemple, j’ai juste marre de vivre à deux pas de ma mère, de draguer tout ce qui bouge en ville et séduire juste pour exister dans un cercle social éphémère, et même si je risque de perdre la perspective et mon rêve de devenir l’humoriste le plus drôle du pays, je suis prêt à changer. Pas changer de ville parce que je me vois pas vivre ailleurs qu’à Amsterdam enfaîte, mais juste m'installer pour vivre une vie de famille et avoir ce dessein dans la vie qu'on appelle 'responsabilité'. Je profite de ce petit moment de silence pour jeter un regard aux alentours, sans décoller ma joue de mes mains déposé sur le banc où siège Hina … Je rapporte mon attention vers elle quand elle évoque l’éventualité qu’on puisse s’écrire à nouveau, soulignant implicitement la nouvelle distance qui se creusera entre nous, comme si elle s’essayait à me dire qu’on ne se reverra plus directement, et qu’on sera à nouveau séparés … Et c’est ça ce qui m’embête, parce que j’ai pas envie de la perdre à nouveau, même si j’ai d’un autre côté envie qu’elle disparaisse, pour mon propre bien on va dire. C'est trop difficile à expliquer. Je soupire presque indirectement, avant de me relever pour caler mon dos contre mon propre banc, croisant les bras … « bon je vais être sincère avec toi Hina … » ouais cette fois, le Jan débile et crétin vient de passer à la trappe … Je vire tout d’un coup à un sérieux qui tue, preuve que ce que j’ai à lui dire est hyper important … « j’aimerais tellement qu’on continue à s’écrire ... ou non j’ai envie tout simplement que tu restes à mes côtés ou que tu vives avec moi, qu’on trouve une solution pour qu’on reste en contact parce que j’ai pas envie de te perdre de vue, ni de te voir loin de moi … » ça serait dur enfaîte, je me suis attaché à elle, c’est pas un mystère pour quelqu’un, sans oublier qu’elle a fait vaciller mon cœur depuis pas mal de temps, et disons que c’est encore le cas actuellement, mais c’est trop compliqué que ça devient limite de la souffrance, pour moi, pour elle, et pour tout le monde d’ailleurs. « mais voilà, j’ai des aspirations très simples pour ma vie future que je compte entamer dès ma sortie du jeu : épouser une femme ni trop moche ni trop belle, avoir deux enfants ; un garçon et une fille, un peu de temps pour les potes, voyager, me trouver un boulot correct et m’acheter une voiture et une maison … » rien de bien simple je dois dire, parce que oui je suis loin d’être le type compliqué qui rêve de gloire, d’argent et d’actrice super belles en guise de femme … non je suis loin de tout ça, je suis clairement le romantique qui n’a besoin que de ça pour vivre et apprécier sa vie à sa juste valeur … Et même si je dois surement me dire qu’elle ne doit pas prendre ce que je lui dis à sa juste valeur, qu’elle doit surement me prendre pour le plus terrible des crétins, mais vu l'énorme différence de mentalité qu'on a, et l'âge qui nous sépare, je la comprends ... elle doit penser en ce moment que je suis vraiment con vu ce que je pourrais m’offrir avec ma notoriété, parceque c'est normal à son âge puisqu'elle ne pense qu'à faire la fête avec ses copines et allumer des mec, c'est normal qu'elle pense ainsi puisque c'est dans son âge, donc du coup je me vois forcé de rajouter pour mieux lui faire comprendre … « j’aurais bientôt 28 ans Hina, et c’est un âge que je trouve correct pour entamer ce que j’ai envie de faire. J’en ai assez des petites histoires d’amour qui ne donneront jamais quelque chose de concret, ou quoique ce soit qui pourrait convenir à ce que je recherche … » ouais j’ai envie de me caser, et c’est un souhait que tout homme désire d’avoir. J’espère qu’elle sera assez mature pour comprendre, car de la maturité et une prise de conscience, il en faut pour gober tout ça et ne pas me prendre pour un débile fini. « Et tu vois, pour que tout ‘ça’’ s’accomplisse, il faudrait peut-être qu’on arrête de se voir, définitivement … pour mon bien, ou plutôt pour notre bien … » je suis sincère, je lâche tout ce que j’avais envie de lui dire et tout ce que je portais sur le cœur, sauf que … « sauf que j’ai pas envie de te perdre tu vois … » ça me fait chier de l’admettre mais c’est plus fort que moi … Et je sais pas comment faire, chez moi l’amour ça s’oublie pas, quand j’aime quelqu’un je ne l’oublie jamais, pire encore, je l’aime toujours ce qui ne m’arrange vraiment pas … « donc comme tu le vois, je suis confronté à un gros dilemme … » un dilemme cornélien vu que je m’étais promis une vie, une certaine vie avec une fille mature capable d’endosser un rôle de maman prête à tenir ses responsabilités, pour vivre et m’offrir cette vie de famille que j’espère tant, donc ouais gros dilemme on doit dire, parce que entre la vie que je rêvais de m’offrir et Hina d’un côté, le choix n’est pas véritablement fait … D’un côté la raison, mon propre bien et mon égoïsme me pousse à choisir la première issu et oublier Hina catégoriquement, mais mon cœur vacille aussi pour la deuxième, ce qui m’empoisonne terriblement l’esprit … Elle a quand même une grosse valeur à mes yeux qu'elle ne s’imaginera jamais, parce que moi-même je ne m'en rendait pas compte, jusqu’à ce que je réfléchisse de cette manière, et que je mette les deux possibilités dans une balance ... moi qui croyait que mon rêve de vivre la vie idéale avec la femme idéale allait triompher sur elle, je remarque que c'est plutôt un équilibre gênant qui prends place, et non ce que j’espérais ... ce qui reste bouleversant quand même ...

Je relève un sourcil et puis finalement je réfléchi... « Ca dépend... » En fait ça dépend, dans le sens que oui, j'en ai marre de certaine chose, mais pas toute. Certaines choses dont je ne peux en parler ni avec lui, ni avec personne. De toute manière je parle jamais de rien avec les autres, ou en général, dans la vie en général, avec personne. Je parle, de tout de rien, je rigole, mais c'est tout. Bref. Ce me trouble qu'il me demande ça, mais je n'ajoute de rien. Je prend cette question comme un aveu de sa part : lui, il en a marre de sa vie d'avant visiblement, c'est surtout ça qu'il faut retenir. Il faut aussi retenir que, si j'ai envie de revenir à ma vie d'avant, ça implique aussi la communication avec Jan. J'ai pas envie disparaître aussi rapidement que je suis apparu. Ou plutôt, j'ai pas envie de disparaître tout court de sa vie, c'est simplement inconcevable. Mais franchement, j'ai peur de sa réaction, enfin peur c'est un grand mot. J’appréhende sa réponse, mais je ne m'attendais pas à une telle réponse. Après, on me dit que je suis compliquée... Tout d'abord, il me dit vouloir continuer à m'écrire, mais finalement non, il a envie que je reste avec lui, ou plutôt près de lui, mais c'est déjà pas possible. Il ne pourrait quitter Amsterdam, je ne pourrais quitter Tahiti. On est déjà bloqué là, mais je n'en dis rien. Je ne me retourne même pas pour le voir en face de moi. Je tourne simplement ma tête de quelque millimètre pour mieux l'entendre. Il me parle ensuite de ce qu'il veut. Une vie simple, une vie de famille classique, que des milliards de personnes ont. Je baisse la tête. J'aurai bien fait un trait d'humour en lui disant que je ne pourrais jamais être sa femme parce que je suis dans la catégorie « femme trop belle », mais ça n'est presque pas une blague. Je n'aspire pas à ça moi, ou en tout cas pas maintenant. À vingt-quatre ans, je n'ai pas encore fait tout ce que j'aurai pu faire étant jeune ou en tout cas, j'en ai pas l'impression. Je ne peux pas, même si je sais que ce n'est pas une demande qu'il me fait, dire ok d'accord, je vais me marier, avoir des gosses, une belle maison et un boulot moins contraignant que celui que j'ai là. J'ai déjà une belle maison, avec l'argent que j'ai gagné à ma manière ; j'ai des amis ; j'ai un boulot qui me convient. Il me précise qu'à son âge, il est bien de penser à ça. Qu'il en a assez des amourettes qui ne lui apporteront rien... Cette fois, je ne peux pas m'empêcher de me retourner vers lui. J'allais lui parler, mais ça sort pas. J'ai envie de lui dire ce que j'ai sur le cœur, mais c'est pas possible. Alors je lui tourne de nouveau le dos, écoutant ce qu'il a encore à dire... Heureusement que je me suis retourner à nouveau d'ailleurs, il ne peut pas voir mon visage et mes yeux devenant un peu humides. Parce qu'il dit qu'on devrait arrêter de se voir, pour un « notre bien » qui semblait être plutôt le sien. Je lâche un soupire, bougeant légèrement ma tête de haut en bas. J'ai bien compris où il voulait en venir... Il pouvait simplement me répondre que non, il ne veut plus que l'on s'écrivent pour sa tranquillité. Et finalement, quand je crois sa réflexion finit, il reprend en me disant qu'il n'a pas envie de me perdre... Je sais pas si ça me fait plaisir, ou autre chose, mais je peux pas m'empêcher de lui souffler : « Arrête... » Parce que je suis perdue. Il fait faire les montagnes russes à mon cœur. Je sais que je ne mérite pas forcément qu'on aille en douceur avec moi, mais pas que l'on me fasse ça quand même. Une fois j'ai envie de pleurer, une fois j'ai envie de me retourner et de le prendre dans mes bras alors que ce n'est absolument pas mon genre. Il me parle d'un gros, dilemme, pourtant moi je n'en vois pas. Je relativise plutôt et me dit qu'il n'en a pas en réalité. Je me tourne vers lui, revenant pourtant à ce qu'il a dit un peu avant : « T'es pas le seul à être dans le doute... Tu veux arrêter tes amourettes, c'est super. Mais moi j'suis pas celle que je prétend être Jan, tu t'en es peut-être rendu compte, mais moi j'ai jamais eu de petites histoires d'amour sans avenir... » Mes doigts se referment sur le dossier alors que je détourne mes yeux. « J'en ai une qu'une seule d'histoire et c'est avec toi... » Et bien non, j'ai jamais été voltiger à droite à gauche, pas de moi-même. Je n'ai jamais accepté de sortir avec quelqu'un et c'est pas faute d'avoir eu des prétendants. Je suis belle, canon, je le sais, j'en joue, mais ça ne m'a jamais apporté toutes ces amourettes de jeunesse comme il dit. Je continue alors, lui disant ce que je n'ai jamais dit à quiconque : « Je t'ai toujours aimé... Si je t'ai quitté, c'est à cause de la distance. Je ne pouvais pas sortir avec toi tout en étant loin de toi... Mais j'ai toujours cru que tu m'attendrais. Que le jours où l'on se reverrait, je pourrais faire n'importe quoi que je pourrais être sûre d'être toujours aimé par une personne... » Lui en l’occurrence, mais c'est trop idéaliste pour être vrai. « Toi tu m'as dit que tu t'es noyé dans l'alcool et dans les putes, mais tu t'es pas demandé comment moi j'avais réagit après ça, après notre rupture. J'suis sure que t'es partie du principe que j'ai enchaîné les conquête alors que pas du tout. Quand je dis que je n'ai aimé que toi, c'est que je n'ai été avec personne d'autre depuis toi... » Et en quelque sorte, j'ai toujours eu en tête que je m'étais réservée pour lui. C'est peut-être ça que j'aurai du lui dire au tout début non ? Ca je ne lui dit pas, mais j'ai même toujours rêvé de perdre ma virginité avec lui. Certes, il est ma deuxième fois, mais ce n'est pas pareil. J'ai l'impression que je vais chialer, alors pour la énième fois, je lui tourne le dos. « Mais t'es pas confronté à un dilemme Jan... Je suis simplement un gros fardeau pour toi et j'ai bien compris que tant que je serais là, tu n'aura jamais le droit à ce que tu souhaites... À un autre moment, j'aurai adoré cette situation, mais plus maintenant... Il ne reste plus qu'à m'en aller de ta vie... » Tout simplement, c'est la meilleure chose à faire. Ou pas, mais je suis prête à prendre sur moi et prendre la décision à sa place. « J'suis pas prête à me pauser quelque part... Encore moins, loin de Tahiti. Alors oui, tu n'entendra plus parler de moi... » Je pince mes lèvres, parce que ça me fait plus mal que je voudrais le montrer. Pourtant tout mon visage est refermé. Plus une once de fierté ne sommeil en moi en ce moment même « Je crois que je suis prête à te laisser avancer de ton côté, sans moi... Si c'est comme ça que je peux te rendre heureux... »

Croisant les bras, j’écoute alors et j’analyse sa réaction, et dans mon diagnostic, je ne peux remarquer une énième fois à quel point elle peut être canon dans sa manière à réagir tout simplement. Genre elle me fait terriblement de l’effet qu’il lui suffirait de sourciller ou de se retourner, dubitative pour qu’elle me fasse fondre. Et c’est troublant, preuve que je suis redevenu sensible à son charme exotique, et à toutes ses manies, ou plutôt à son art de charmer autrui. Ou non, à me charmer tout court. J’écoute donc, et je me tais un bon quart d’heure pour la laisser déballer tout ce qu’elle a dire. Je sais bien qu’elle ne sera, ou plutôt qu’elle ne pourra jamais être la femme de ma vie. Elle ne colle surtout pas avec celle que je me fais depuis des années d’épouser, du moins je le croyais avant, aveuglé de la sorte, mais cette aventure m’a fait ouvrir les yeux sur la personne. Elle n’a pas les critères de la femme stable et responsable que je recherche, et ça j’ai fini par l’admettre, même en vue de l’attachement et de la forte attirance que j’ai pour elle, du coup je me dis que ça devait se finir ainsi, et que c’était la meilleure solution pour nous deux, de ne plus se voir et que chacun vivent sa vie comme il la conçoit. Du moins j’y comptais bien, sauf qu’elle s’avère être difficile à oublier, et que je me refuse encore de laisser tout tomber ainsi vu les sentiments que j’ai pour elle. Elle m’explique Ô combien elle ne peut réfléchir à se caser de si tôt, ce que je comprends puisqu’elle affirme qu’elle n’a pas encore vécu ce que j’ai vécu ... Je conçois, cette expérience est primordiale pour finalement savoir que le plus important, c’est la famille. La différence d'âge en prime, j'ai connu des chose et j'ai fini par comprendre certaines choses qu'elle ne pourra, ou ne sera jamais capable d'assimiler à leurs juste valeur. Du coup elle doit passer par cette étape aussi, connaître des gens, connaître quelqu’un d’autre que moi pour qu’elle vive son étape. Je ne me pensais absolument pas venir lui proposer de partager le mode de vie, familial soit-il que je m’étais décidé d’adopter pour le restant de mes jours, car ça aurait été tout simplement inconcevable … Elle serait surement prise par la tentation de l’adultère par exemple dans le soucis de goûter au plaisir de connaître quelqu’un d’autre que moi, et cela se comprendrait, mais qui me ferrait tellement mal que ça sonnerait le glas de notre union, et ça je préfère le prévenir que le guérir, inguérissable soit-il. Et c’est pour ça d’ailleurs que je ne la contrarierai pas, même si je me refuse de la voir avec quelqu’un d’autre que moi, je m’y ferais, je l’oublierais même histoire de ne pas m’empoisonner l’esprit, mais je la laisserais vivre sa vie. Elle est encore immature pour être celle que je recherche, elle l’a comprise, je l’admet, et ça me fait mine de rien plaisir qu’elle le comprenne, ce qui démontre qu’elle n’a pas un si mauvais fond, comme certains oserait le dire… Puisqu’elle accepte l’idée que je vive ma vie avec quelqu’un d’autre, moi qui croyait qu’elle n’allait pas adhérer au concept et qu’elle allait piquer une énième crise, preuve aussi qu’elle démontre une grosse maturité, et ça me fait drôlement plaisir de la voir ainsi, moins enfantine, plus sérieuse, plus stable et moins infantilisée et bornée que d'habitude … « Tu n’es pas un fardeau, arrête de penser ça … Tu es juste précieuse à mes yeux, ce qui te rend très importante à un point que tu ne puisses l'imaginer, et que te perdre serait une grosse erreur dans ma vie, je le sais, mais je suis prêt à prendre les responsabilités de cet acte … donc non tu n'es pas un fardeau, arrête de le penser ... » ça me fait mal de dire ça, d’autant plus que ça me fait mal d’entendre qu’elle est prête à s’éclipser de ma vie, qu’elle compte s’en aller définitivement de la mienne et que les probabilités de se retrouver sous un même toit demeure improbable, voir même quasi impossible … D’un côté je dois être rassuré puisque c’est moi qui a causé l’événement, mais non je suis partagé, gravement partagé et ça me plombe l’humeur … Je ne pensais pas que ça serait difficile à encaisser, parce que oui je l’aime énormément, mais la vie est faîte ainsi, c’est pas un disney où la fin est toujours heureuse, et il faut finalement l’admettre, coûte que coûte, parce que vivre dans l’illusion n’est pas une vie … ça me fait du mal, à l’intérieur de moi-même, preuve encore que c’est un gros dilemme devant lequel je dois me décider en tant qu’homme responsable, et il s’avère être plus coriace que je ne le pensais. C’est dur. Et quand j’écoute ses dernières paroles, quand elle annonce qu’elle décide de prendre sur elle pour me rendre heureux, là je n’ai qu’un seul réflexe, instinctif et guidé par mon amour tellement je vois qu’elle ne me veut que du bien, que finalement la personne est dotée d’une extrême bonté, et que c’est de loin la personne que je pensais être … du coup mes bras l’enlacent considérablement par derrière et je réfugie ma tête dans son cou que j’embrasse tendrement, forçant mon étreinte pour lui faire passer la chaleur, le soulagement aussi et l’amour qui circule en moi … Je souffle au niveau de ses oreilles de faibles mots … ou plutôt un faible mot qui n'exprime pas tout ce que je ressens en ce moment même ... « merci … » oui je la remercie pour toute cette compréhension, et je vire mes mains de son corps pour revenir à mon banc et calmer mon esprit tourmenté, déchiré entre le soulagement et la tristesse, tellement de tristesse que j’ai envie de chialer alors que j’ai jamais pleuré de ma vie, mais mes yeux ne cèdent pas, et finalement je sorts, presque sûr de mes mots qui viennent du fond de mon cœur … « Hina, tu me verras peut-être avec quelqu’un d’autre, tu me verras peut-être autour d’une nouvelle famille, satisfait et heureux de ma nouvelle vie, mais il faut que tu saches que t’as été mon tout premier amour … et ça, ça compte vraiment … » mais vraiment … Elle aura toujours une place dans mon cœur, parce que je suis sûr que même si j’aimerais la femme qui arrivera plus tard à l’infini comme je suis coutume d’aimer une femme précieuse en général, Hina restera indélogeable de là ou je l’ai mise, c'est-à-dire dans mon cœur qui ne se risquera jamais de l’oublier … parole de Jan.

Sujet Terminé pour Jan.